26-28 juin 2025 Paris (France)

Appel à papiers

Historical Materialism Paris 2025 : Conjurer la catastrophe


Le dernier « Congrès Marx International » a eu lieu à Paris en 2010. Depuis lors, dans l’espace francophone, aucune conférence internationale s’inscrivant explicitement dans le cadre du marxisme, durant laquelle les différents courants intellectuels et politiques puissent se rencontrer et discuter pendant plusieurs jours n'a été organisée. Faire connaître et mettre en débat les recherches marxistes les plus novatrices intellectuellement mais aussi les plus urgentes politiquement : voilà l'objectif que nous poursuivons à travers l'organisation de la première conférence « Historical Materialism Paris » du 26 au 28 juin 2025, qui s’inscrit dans la série de conférences organisées par la revue Historical Materialism d’abord à Londres, puis à Ankara, Athènes, Barcelone, Berlin, Beyrouth, Cluj, Istanbul, Melbourne, Montréal, New Delhi, New York, Rome, Sydney et Toronto, ainsi qu’une version en ligne pour l’Asie du Sud-Est. 

Entretemps, le monde n'a pas changé de base mais certaines des principales tendances déjà à l’œuvre se sont accentuées. Le processus de dé-démocratisation des États s’est radicalisé, soulignant l'intrication du néolibéralisme avec les formes autoritaires de domination politique. La montée en puissance de mouvements néofascistes ou de forces de la droite traditionnelle en voie de fascisation, s’est accélérée à l'échelle globale. Les tensions géopolitiques entre les grandes puissances se sont durcies, l'invasion de l'Ukraine à partir de 2022 laissant entrevoir la possibilité d'un conflit militaire généralisé. Le déchainement de la pandémie en 2020 a manifesté l'apparition de nouvelles menaces pour l'humanité entière ainsi que les effets de la dégradation des systèmes de santé publique. La guerre génocidaire menée depuis octobre 2023 par l’État d'Israël à Gaza, avec le soutien des impérialismes occidentaux, a mis en pleine lumière la persistance du colonialisme sous ses formes les plus criminelles. Enfin, l’approfondissement des crises écologiques, avec 2023 qui a été l’année la plus chaude depuis la période préindustrielle et 2024 qui devrait la surclasser sur ce point, contraste avec l'inaction des gouvernements bourgeois et nous entraîne vers l'abîme. 

La période récente, pourtant, n’a pas seulement été caractérisée par la montée des forces réactionnaires, des militarismes et des catastrophes ; elle a aussi donné lieu à des soulèvements populaires, à des expériences de contestation de masse et à des alliances nouvelles entre mouvements qui ont défié l’ordre dominant : des occupations des places en 2011 au soutien à la résistance palestinienne, en passant par le renouveau de la conflictualité de classe, l’aiguisement des luttes anti-racistes, le renouveau des pratiques féministes et la radicalisation des mouvements écologistes.

Sur le plan intellectuel, le marxisme a indéniablement retrouvé une audience au sein des franges critiques du champ intellectuel et des mouvements d’émancipation, en se liant à leurs secteurs les plus dynamiques et ce, malgré l’absence d’organisations communistes de masse. Nous sommes ainsi sortis de la longue période de déclin du marxisme issue de l’offensive proprement contre-révolutionnaire qui a si fortement marqué le champ intellectuel en France dans les années 1980 et 1990, au point que Perry Anderson pouvait alors parler de Paris comme de la « capitale de la réaction intellectuelle en Europe » et que Bourdieu pouvait parler de cette période comme celle « où le dernier must de la mode [était] d’être revenu de tout, et d’abord du marxisme ».

Nous invitons les intervenant·es à proposer des panels ou des abstracts (300 mots maximum), en français ou en anglais, avant le 15 février 2025, portant notamment sur les axes suivants (en indiquant 1 ou plusieurs axes dans lesquels s’inscrit leur proposition). Les propositions sont à déposer sur ce site. Pour nous contacter : paris@historicalmaterialism.org.  

 

Axe théorie marxiste 

Les post-marxismes, qui tendent à réduire le marxisme à une tradition dont on pourrait se contenter de tirer arbitrairement quelques éléments en faisant abstraction des autres, imposent de s’interroger sur ses spécificités. D’une part, le marxisme constitue un cadre théorique général permettant d’analyser la réalité humaine dans toutes ses dimensions, un projet de science humaine totale articulant l’étude de toutes les sphères sociales (économie, politique, culture et idéologie, etc.) et même naturelles (métabolismes socio-écologiques).

Mais comment comprendre une telle articulation, et ne risque-t-on pas d’écraser la réalité sociale sur une seule de ses dimensions (réductionnisme, économicisme) ? D’autre part, le marxisme constitue une critique de la réalité sociale établie visant à la renverser, et est en ce sens indissociable d’une lutte politique. Comment comprendre l’unité de la théorie et de la pratique qui est censé le caractériser ? Ne risque-t-elle pas de nuire à sa rigueur intellectuelle ? Et quelles modifications du cadre théorique doivent être acceptés pour suivre les changements historiques (problème de l’historicisme) ?  Ce panel s’interrogera donc sur les spécificités du marxisme par rapport aux autres théories sociales, ainsi qu’aux éventuels problèmes qu’elles posent. 

 

Axe Classe

De Marx aux recherches les plus contemporaines, en passant par les théoriciens du début du 20e siècle et la relance du débat dans les années 1960-70, le marxisme a toujours accordé une importance déterminante à la division en classes sociales et à leurs antagonismes, conçus comme un élément central pour comprendre la dynamique des sociétés capitalistes. Cet axe propose de croiser les différentes perspectives théoriques et politiques qui découlent de ces principes :
- Interrogations sur les structures de classe : segmentation sociale, frontières et composition des classes dans le cadre des mutations actuelles du mode de production capitaliste (impact de l'IA, tertiarisation, prolétarisation, précarisation, essor des auto-entrepreneurs...)
- Recherches sur la formation des classes : processus socio-historiques de constitution et de reconfiguration des classes, ainsi que l'évolution de leurs formes d'organisation (naissance du mouvement ouvrier, état du mouvement syndical, renouvellement des répertoires d'action, rapport avec les mouvements féministes, antiracistes, écologistes...)
- Réflexions sur la conscience de classe : enjeu de(s) représentation(s) politique(s) du prolétariat et effets des transformations du capitalisme sur les modes de subjectivation (principe d'unité et lignes de division, structuration politique, pratiques d'autonomie ou de collaboration...)

 

Axe féminisme

Depuis le 20ᵉ siècle, le féminisme marxiste analyse l’exploitation des femmes et des minorités de genre dans le système capitaliste patriarcal et racial. Il enrichit la théorie des inégalités sociales tout en soutenant des pratiques militantes visant à renverser l’hétéropatriarcat, avec une approche anti-essentialiste des dominations et une défense de la convergence des luttes. Aujourd’hui, une nouvelle vague féministe remporte des victoires mondiales, mais elle affronte un backlash : menaces sur les droits des femmes et des minorités, récupération par le féminisme néolibéral, et montée des doctrines antiféministes d’extrême-droite. Cet axe souhaite offrir un espace de discussion sur les thématiques suivantes :

  • Féminismes contre l’extrême droite : face à une contestation féministe massive, l’extrême droite, en France et ailleurs, adopte des discours transphobes, xénophobes et islamophobes, s’attaque aux études de genre, limite le droit à l’avortement et alimente des violences homophobes et transphobes. Ce sous-axe analyse discours, pratiques et politiques de ces mouvements pour mieux les combattre.
  • Violences patriarcales : les mobilisations comme MeToo et Ni una menos ont remis sur le devant de la scène les violences faites aux femmes et aux minorités de genre, exacerbées en contextes de guerre (Ukraine, Palestine, RDC, Soudan). Ce sous-axe explore théories, mobilisations, autodéfense et imbrications des violences.
  • Féminismes/queers et écologie : alors que l’écologie est un enjeu central et parfois instrumentalisé par le capitalisme, ce sous-axe examine l’impact des bouleversements environnementaux sur les femmes et minorités de genre, leurs rôles dans les luttes écologiques, ainsi que des approches écoféministes.
  • Pratiques militantes : ce sous-axe réfléchit aux évolutions des pratiques militantes féministes, entre avancées (démocratie interne, prise en compte des violences) et limites (course aux oppressions, tensions intracommunautaires), en interrogeant nos modes d’organisation.
  • Épistémologie marxiste féministe : contributions théoriques ou empiriques analysant les rapports de domination d’un point de vue marxiste féministe, notamment autour de la Théorie de la Reproduction Sociale, sont bienvenues, ainsi que des réflexions sur autrices peu connues ou des recherches innovantes.

Nous encourageons les communications empiriques portant sur des études de cas historiques ou contemporains, sur des mobilisations, sur des productions artistiques... Les retours d'expériences d'un point de vue militant sont tout autant les bienvenus que les propositions scientifiques.

 

Axe Économie

La profonde crise économique de 2008 a révélé les contradictions du néolibéralisme, sans qu’apparaisse une nouvelle dynamique capitaliste un tant soit peu stable. Plutôt que de subir un coup d’arrêt définitif, la financiarisation s’est transformée et les entreprises sont de plus en plus sous perfusion des autorités publiques - au point de ressusciter l’idée de capitalisme d’Etat. Alors que l’inflation est revenue dans les pays du centre, les difficultés sociales, économiques et écologiques ont continué à s’aggraver dans la périphérie. Les inégalités existantes ont été cimentées et même élargies par la monopolisation intellectuelle d'une part encore plus importante des connaissances produites par la société, des vaccins anti-Covid aux technologies numériques. Comme si tout cela ne suffisait pas, l’ère de l’IA dans laquelle nous vivons actuellement est aussi une ère de guerre et de stagnation, sur fond de tendances rentières.

Voici une liste non exhaustive de questions dont cet axe pourra permettre de débattre :
- Quels mécanismes expliquent l’essoufflement du capitalisme contemporain et les tensions sociales et politiques qui en découlent ? 
- Assistons-nous à la continuation de la période néolibérale ou à l’avènement d’une nouvelle phase du capitalisme ? 

- Comment comprendre les contradictions économiques liées à la crise écologique : nouvelles stratégies d’accumulation liées à la « transition écologiques », renouveau de la planification, reconfiguration de la polarisation centre-périphérie… ?
- Quel rôle jouent les Etats dans la lutte des classes aujourd’hui ? 

 

Axe Impérialisme

Depuis la fin de la Guerre Froide, les tensions inter-étatiques et les conflits armés entre Etats et groupes non-étatiques se sont multipliés à travers le monde. En parallèle, la course à l’armement atteint chaque année un nouveau record de dépenses militaires, lesquelles augmentent à un rythme plus soutenu que le PIB mondial. Loin des illusions libérales sur la paix perpétuelle assurée par le marché mondial, la pensée marxiste se singularise par la mise en évidence du lien étroit entre le développement du capitalisme et les tensions géopolitiques. La situation actuelle appelle donc à un retour en force des raisonnements fondés sur les théories de l’impérialisme. Ce stream vise à rassembler des réflexions théoriques et analyses concrètes inspirées par les conceptions marxistes de l’impérialisme.

Voici une liste non exhaustive de questions à débattre dans cet axe :
- Comment penser l’impérialisme aujourd’hui ? Quelles approches privilégier : les théories de l’Empire/l’Etat transnational ? Celles du super-impérialisme américain ? Ou celles qui lisent les affrontements actuels comme le retour de rivalités inter-impérialistes ?
- Comment comprendre les différents types de tensions – les conflits entre grandes puissances, entre puissances régionales, les guerres intra-étatiques – à partir d’une lecture en termes d’impérialisme ?
- Quels sont les ressorts et les transformations de l’impérialisme français ?
- Comment, à travers leurs interventions à l’étranger, les Etats impérialistes transforment leur propre société (militarisme, racisme, autoritarisme, fémonationalisme, rapports de classe, etc.) ? 
- Quel lien peut-on établir entre la théorie de l’impérialisme et les pratiques anti-impérialistes ?

 

Axe Etat

Depuis les interventions massives des Etats après la crise de 2008 jusqu’au réarmement en cours de toutes les principales puissances géopolitiques en passant par le management de la pandémie, les recherches critiques sur l’Etat, en particulier celles d’inspiration marxiste, ont connu un regain d'intérêt, pour des raisons autant théoriques que pratiques. Dans cet axe, nous proposons de les approfondir notamment selon les trois problématiques suivantes :
- État, exploitations, dominations : l’une des interrogations structurant les approches marxistes de l’État est celle de son rapport avec l’exploitation capitaliste. Dans quelle mesure l’État est-il un instrument aux mains des capitalistes, ou remplit-il des fonctions capitalistes pour des raisons structurelles ? Quelle est la spécificité des États capitalistes, par rapport aux États antiques et féodaux par exemple ? Est-ce qu’aujourd’hui l’on peut remarquer des différences substantielles entre le fonctionnement des Etats à l'échelle globale ? Comment, dans tous les cas, repenser la question de son autonomie relative ? De tels problèmes,
que l’on trouve en germe chez Marx et Engels eux-mêmes, et qui ont donné lieu à des controverses célèbres (entre Miliband et Poulantzas par exemple) doivent bien évidemment être examinés à nouveau frais en raison des mutations historiques du capitalisme contemporain. De plus, ces différentes approches peuvent être enrichies en prenant également en considération le rapport de l’Etat à d’autres systèmes de domination, en premier lieu le patriarcat et le racisme systémiques.
- Les transformations de l’État : le rôle et les interventions de l’État doivent être appréhendés historiquement, et ses transformations réinscrites dans le cadre des transformations sociales et économiques. Il s’agit notamment d’analyser, d’une part, la mise en place et le développement de l’État social au cours du XXe siècle, et, d’autre part, sa remise en cause par le néolibéralisme. Est-ce que le néolibéralisme autoritaire correspond à un nouveau type d’État ? Est-ce que les crises économiques et écologiques contemporaines appellent un « retour de l’État », avec de plus forts investissements et une certaine dose de planification ?
- Que faire de l’État ? : Si les États (comme l’État prussien et celui de Napoléon III) auxquels étaient confrontés Marx et Engels apparaissent incontestablement comme des ennemis, la mise en place des institutions et dispositifs constitutifs de l’État social, et les attaques de celui-ci par le néolibéralisme, rendent les débats stratégiques plus complexes. Comment, sans abandonner une critique anticapitaliste de l’État, défendre l’État social contre les attaques néolibérales ? Comment promouvoir des luttes par en bas, sans abandonner le terrain étatique, lequel semble aujourd’hui difficilement contournable ? Quel bilan tirer des deux vagues de gouvernements dits progressistes en Amérique Latine ? En un mot : quelle stratégie face à l’État et au sein de l’État ?

Axe Travail et exploitation 

Depuis plusieurs années, le travail est de nouveau au cœur de disputes. Sans être exhaustifs, celles-ci portent sur le « sens du travail » après le début de la crise sanitaire du Covid-19 et de la crise climatique ; sur les effets des nouvelles technologies (digitalisation, industrie 4.0, intelligence artificielle) ; sur les transformations des frontières du salariat – retour à des formes « archaïques » de mise au travail (comme le « tâcheronnat »), émergence d’un « capitalisme de plateforme » – dans le contexte d’une tendance à l’hybridation entre formes de précarité et de stabilité salariale.

De façon analogue, l’emploi est au cœur de recherches et de mobilisations sociales qui se donnent pour objectif de réactualiser le concept en prenant en compte les dynamiques de fragmentation et l’hétérogénéité qui caractérisent les régimes d’exploitation contemporains. Il s’agit le plus souvent d’intégrer une perspective féministe et intersectionnelle à l’analyse de l’emploi, afin de rendre compte tout d’abord de la façon dont la race et le genre segmentent les organisations du travail, et ensuite du potentiel subversif d’un salariat largement féminisé et racisé.

Enfin, de façon transversale, le concept de l’exploitation revient au-devant de la scène pour analyser l’articulation entre travail, emploi et capitalisme, tout en l’élargissant, en intégrant notamment les transformations liées au numérique ou l’« exploitation des vivants » dans le contexte de la crise climatique. 

Cet axe vise donc à rassembler des contributions s’inscrivant au sein de ces débats, et interrogeant les formes contemporaines du travail et de l’exploitation à partir notamment des concepts liés aux questions de
- L’impact des nouvelles technologies sur le travail : « capitalisme de plateforme », « digital labour », « industrie 4.0 » ; « intelligence artificielle » ;
- Les frontières du travail et de l’exploitation : « précarité », « multi-activité », « travail gratuit », « sens du travail », « aliénation » ;
- Perspectives intersectionnelles et/ou trans-nationales : « articulations genre et race » ; « résistances » ; « travail reproductif ».

 

Axe migrations

Le constat n'est pas nouveau : les déplacements par-delà les frontières de travailleuses et de travailleurs sont à la fois le produit des déséquilibres globaux générés par la domination impérialiste et le développement du capitalisme à l'échelle mondiale, et une nécessité pour des secteurs entiers des économies capitalistes à l'échelle locale, nationale ou régionale. La question des migrations est ainsi au cœur des tensions économiques et politiques des sociétés capitalistes, mais elle prend un caractère d'autant plus urgent qu'elle constitue l'un des carburants de la montée des extrêmes-droites, et que sa gestion par les gouvernements des États capitalistes génère chaque année des milliers de morts. 

De la frontière sud des États-Unis aux frontières extérieures de l'Europe, en passant par le rétablissement récent des contrôles aux frontières en Allemagne, les gouvernements impérialistes cherchent à limiter et contrôler la circulation de la force de travail provenant de régions du monde marquées par des guerres, des conflits armées ou des situations de pauvreté croissante. Ces politiques ont une double conséquence : d'une part sur la composition des fractions immigrées des classes ouvrières où l'irrégularité du séjour se combine à diverses formes d'exploitation, d'autre part sur les rapports entre États impérialistes et entre ces derniers et les États du Sud, qui se livrent à une surenchère mortifère. L'enjeu migratoire est également pressant du point de vue des pays du Sud, qui ne sont pas uniquement des pays « de départ » mais qui sont aussi confrontés à des migrations internes et à des arrivées parfois massives depuis des pays proches (on pense par exemple aux Syriens en Turquie, aux Afghans en Iran...). 

Cet axe vise ainsi à rassembler des contributions qui interrogent le rôle de l'immigration dans les sociétés capitalistes d'aujourd'hui et d'hier, du point de vue des pays d'arrivée et de départ, au Nord comme au Sud, à partir des axes suivants (non limitatifs) :
    - migrations, frontières et politiques sécuritaires ;
    - migrations, travail et formation ou déformation des classes ouvrières ;
    - migrations et besoins de main-d’œuvre : encadrement, secteurs, qualifications des travailleuses et travailleurs migrantes ;
    - migrations et politique : cause immigrée, mobilisations de travailleuses et travailleurs immigrés, xénophobie, racisme et nationalisme
    

Axe Race / Racialisation

L'analyse du racisme est percutée depuis plusieurs années par plusieurs discussions importantes : d'une part l'appel à prendre en considérer les formes croisées et combinées des rapports de classe, de genre et de race, d'autre part les débats historiques et sociologiques autour des liens entre naissance et fonctionnement des sociétés capitalistes et racisme. L'ancienneté de ces débats dans la pensée marxiste est attestée par les études pionnières d'historiens marxistes états-uniens sur la construction de la blanchité ainsi que par l'analyse du capitalisme racial en Afrique du Sud par des militants et intellectuels marxistes noirs.

L'essor des analyses utilisant la catégorie de « race » est aussi liée à diverses formes de mobilisation qui ont percuté les organisations syndicales et politiques ouvrières en posant le problème de la prise en compte des dimensions raciales de l'exploitation et des dominations, et de collectifs mobilisés autour de ces questions. Une question, polémique, demeure : en quoi la catégorie de « race » est-elle pertinente pour l'analyse marxiste des rapports de domination et d'exploitation ? 

Afin d'aborder cette question, cet axe accueille des contributions autour des thématiques suivantes (non limitatives) :
    - le concept de capitalisme racial, ses intérêts et ses limites ;
    - les rapports entre racisme, formation des classes sociales et dynamiques historiques du capitalisme ;
    - les rapports entre racialisation, exploitation de la force de travail et l'ensemble des rapports de domination ;
    - les luttes anti-racistes et leurs rapports éventuels avec d'autres types de luttes sociales et politiques ouvrières ;
    - le racisme comme politique ou instrument des gouvernements bourgeois. 
    

Axe Écologie politique

Rien ne semble aujourd’hui pouvoir enrayer l’emballement du climat et les perturbations de la biosphère. Le contexte politique mondial caractérisé par une montée en puissance des populismes réactionnaires apparaît comme un obstacle de plus à une révolution écologiste qui serait seule capable d’endiguer la logique productiviste du capital. Dans ce contexte, des mouvements écologistes radicaux ont émergé partout sur la planète, rompant peu à peu avec le dogme de la non-violence et les illusions passées sur le rôle des États bourgeois dans une hypothétique transition.

D’un point de vue théorique, cette radicalisation s’est accompagnée d’un renouveau stratégique du marxisme en écologie politique. De la planification à la décroissance, du sabotage aux nouvelles théories écologiques du prolétariat, de la reproduction sociale à la subsistance, l’écologie politique marxiste se présente comme l’un des champs les plus dynamiques de la pensée contemporaine. Il ne laisse pourtant pas de soulever des débats internes sur le rôle des solutions techniques et le productivisme, sur la centralité de la classe ou la dimension impérialiste et raciste de l’écologie du capital. Cet axe vise à rassembler des études concrètes, des réflexions théoriques et des approches stratégiques inspirées par les visions marxistes de l’écologie politique, contribuant ainsi à élucider la signification des controverses internes et leur rôle pour une stratégie révolutionnaire en écologie.

Voici une liste non exhaustive de questions qui pourraient être adressées par les communications :

1. Quelle est l’actualité du commentaire écologique de Marx ? Quelle actualisation ou quel dépassement de la théorie de la rupture métabolique faut-il envisager ? L’écologie de Marx tend-elle vers une théorie critique de la nature ?
2. Comment penser la centralité de la technique dans la trajectoire écocidaire du capitalisme ? Appelle-t-elle un technosolutionnisme communiste ou bien conduit-elle au contraire à rompre avec tout productivisme et tout idéal du progrès technique ?
3. Comment penser l’articulation des luttes territoriales pour la défense des conditions d’habitabilité de la terre et des combats sociaux pour l’émancipation des travailleur·ses ? L’écosocialisme est-il une réponse suffisante ?
4. Quelles réponses l'écomarxisme peut-il opposer aux arguments néo-malthusiens en écologie politique, à la soi-disant menace démographique et aux discours racistes qui les accompagnent?
5. Quel type d’internationalisme écologique doit s’imposer face à la dimension impérialiste des politiques extractivistes et à la division internationale raciale du travail ?
6. En quoi le marxisme agraire nous permet-il d'enrichir la description et l'analyse des processus d'accumulation du capital à l'échelle globale ? Quelles perspectives politiques s'ouvrent quand on place les questions agraires au centre de l’analyse ?
7. Quelles transformations l’écoféminisme impose-t-il au marxisme écologique ? La subsistance et la reproduction sociale peuvent-elles incarner l’horizon stratégique de la lutte des classes à l’heure du changement climatique ?
8. Comment décrire, d’un point de vue marxiste, les destructions environnementales et les luttes qui s’y opposent ? Quels mots d’ordre peuvent nourrir ces luttes ?
9. Quelle place accorder aux animaux et aux autres vivants non humains dans la description des ravages écologiques et dans l’élaboration d’une écologie d’émancipation ?
10. Comment concilier un programme de planification écologique avec l’exigence de décroissance économique ?
    

 

Axe Culture et arts

Souvent invisibilisée, la question culturelle a pourtant été l'objet de vifs débats au sein de la tradition marxiste, notamment et par exemple, autour du réalisme, de la popularité et des avant-gardes, de son articulation à l’idéologie et au marché. Elle s'appuie pour cela, plus ou moins, sur une multitude d'œuvres et d'essais qui témoignent, fermes ou tâtonnants, de la richesse de cette histoire (opprimée) des pratiques culturelles et artistiques des opprimé.e.s ou de l'appropriation dans une optique résistante ou révolutionnaire de ce qui ne leur était pas destiné. A ce titre, une des questions majeures des temps présents tient probablement à la forme que doit prendre cet héritage : son bilan, ses acquis, ses obsolescences, ses impensés ou ses prolongements possibles. Cela suppose de le discuter, de le faire réémerger dans la vitalité, la pluralité et l'historicité des arguments et des pratiques. 

Mais ces débats doivent se mener à l'aune des transformations du monde contemporain. Ainsi de manière non-exhaustive : l'évolution des industries culturelles et du marché de l'art, le statut de l'artiste, l'invention et la diffusion de nouvelles formes artistiques, les pratiques culturelles de masse, les innovations technologiques, les offensives et victoires idéologiques de la domination autant que les mouvements qui leur résistent (féminisme, anti-impérialisme, ...). De même, ils doivent prendre acte des œuvres qui inventent et redisposent autrement la question sensible et, plus largement, des contradictions de la pratique de l'art et de la culture dans une conjoncture néolibérale : réception, expression, socialisation. 

            Plusieurs questions se posent donc. Elles nécessitent une attention aux singularités spatiales et historiques ainsi qu'à la diversité des formes, des supports et des disciplines. Elles ont pour elles la profondeur d'un vaste ensemble de débats et d'expériences – leur analyse et les rapports du marxisme à l'art et la culture est déjà, en soi, un objet d'étude. 

 - Quelle part joue et prend la culture dans les luttes et les absences de lutte, dans la reproduction de la domination, dans la bataille pour l'hégémonie ? Quels liens peut-on analyser entre l'art et l'idéologie, l'art et le marché, entre l'art et l'émancipation et, plus largement, entre l'art et la politique ?

 - Quelles œuvres sont faites pour quels publics ? Quelles œuvres sont issues de quels publics ? Comment analyser en marxiste les pratiques de l'art et de la culture, les rapports de l'art à la culture et inversement ?

 - Quelles sont ou doivent être les fonctions sociales (historiques et contemporaines) de l’artiste ? Comment envisager la création, l'œuvre, les productions, le travail de l'art ?

 - Comment le marxisme renouvelle-t-il l’histoire des arts (notamment la question des valeurs et des hiérarchies, des discordances temporelles) ? Par qui doit-elle être faite, et comment ? 

 - Que peut être une critique d'art contemporaine matérialiste, non-dogmatique, nourrie des apports contradictoires du marxisme ?

 - Quels outils d'analyse développer pour les productions culturelles ? Quelle conception marxiste peut-on développer de la structuration actuelle du monde artistique, de l'évolution des politiques culturelles, des formes d'institution, de leur contestation et de leurs marges ?

 - Quelle place faut-il accorder à l'art, la création et la culture dans l’élaboration d’une perspective stratégique ?

 

Axe Géographie critique

Cet axe a pour objectif d’interroger les dynamiques spatiales contemporaines de la production de l’espace capitaliste et de la lutte des classes. S’inscrivant dans le cadre de la géographie critique, du matérialisme historico-géographique ou encore de la partition proposée par Henri Lefebvre, cet axe proposer d’analyser les nouvelles formes d’appropriation et d’accumulation du capitalisme actuel.

 

La production de l’espace, la circulation des marchandises et de la force de travail et les processus d’urbanisation en cours dans le monde sont, de ce point de vue, à interroger sous l’angle des luttes qui peuvent en interrompre où inverser la dynamique, révéler ses contradictions internes et ouvrir des terrains de subjectivation politique. HM Paris 2025 intervient après des vagues de grèves et mobilisations qui ont fait des territoires et des réseaux productifs, de l’écologie et des régimes de propriété un terrain fondamental de développement de la lutte de classe. 

 

Pour cet axe, nous sommes particulièrement intéressés par des contributions, y compris à partir d’études de cas, sur les sujets suivants :

  • Renouvellement ou intensification des formes d’accumulation et d’appropriation ; financiarisation, privatisation de l’espace, marchandisation des communs, grands événements mondialisés (notamment les JO)… ;
  • Renouvellement des relations centres / périphéries (rapports ville / campagnes, formes contemporaines de l’impérialisme) ;
  • Luttes et mobilisations qui interrogent les régimes de propriété de sols et la rente immobilière, l’appropriation des ressources ou de l’espace ;
  • Formes et expériences d’organisation et de réappropriation alternatifs ;
  • Pratiques urbaines de solidarité internationale, accueil des migrants, pacifisme actif.
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